Quel marathon !
Ce dimanche 9 juillet, le soleil brille de mille éclats sur le canal. L’eau scintille. Le ponton du CRB Aviron s’anime des premiers rameurs qui préparent leur matériel. Pour nous, ce sera un court passage pour charger nos trois K1 et partir vers Mechelen. La jolie ville (évangélisée au VII ème siècle par Saint Rombaut) accueille le Championnat de Belgique Marathon K1.
A 11 heures, la réunion préparatoire se déroule dans la salle de musculation au premier étage du splendide bâtiment du KCCM. Qui a déjà pris le temps de regarder l’architecture « paquebot » de cette splendide maison transformée en club kayak ? C’est Eric Verduyckt qui anime la réunion. Les clubs et participants sont confirmés ou modifiés. Le parcours est expliqué clairement. Il ne reste plus qu’à récupérer les sacs contenant les numéros de chaque participant et payer les éventuelles inscriptions. A noter que les personnes venant de l’étranger participaient gratuitement. A noter encore que l’épreuve accueille également une catégorie ‘Propaganda’ qui permet à chacun de s’aligner sans devoir être détenteur d’une licence, permettant donc à tout le monde de se lancer sur une belle distance dans des circonstances identiques aux compétitions officielles du championnat. Une super idée ! Pour ceux qui participent en ‘Propaganda’ la participation est également gratuite. Là encore chapeau à l’organisation !
11h30, il est temps d’aller casser la graine puis de préparer les bateaux. Lulu et Estelle s’aligne en Propaganda. Pour Estelle, il s’agit de sa toute première compétition en K1, et la toute première fois sur une distance de 12 bornes. Pour Lulu, il faudra enquiller 17 kilomètres. Ces 17 kilomètres constitués de trois boucles qui passent devant le club house du KCCM. Les seniors devront manger 24 kilomètres. Avec deux portages supplémentaires pour enjamber l’écluse de Battel. A midi ce sont les tous jeunes qui se mesurent les uns aux autres. Certains ont à peine 7 ans. Splendide de voir ces petiots déjà animés par la passion du kayak. Certains de ces petits sont accompagnés d’un ado qui assure la sécurité. Quelle merveille de voir un club qui fonctionne en responsabilisant ls membres. Les plus aguerris entourent les plus faibles. Chacun à son niveau peut en faire autant. A retenir pour l’avenir de notre discipline.
13h00 pile : les seniors s’élancent dans des gerbes d’eau impressionnantes et la réputation du bassin de Mechelen est confirmée, les vagues se génèrent en quelques secondes et persistent…looooooongtemps. 13h03 : les aspirants se déchainent… Ils sont impressionnants ces jeunes. Aisance, technique, puissance et mental. Chouette à voir. 13h06, voilà les vétérans, dont moi. Je m’insère délicatement entre deux bateaux. Cela sent la hargne, la gniac, et l’envie d’en découdre. Le starter fait patienter quelques instants demandant à certains de reculer et..à moi d’avancer. Timidité, peur de gêner les « vrais », il faut dire qu’il y a du beau monde dans cette course, l’instinct me fait mettre en retrait de ces actuels ou anciens champions. Le ‘ready-set-go’ est lancé...
Wouaw, cela secoue dans tous les sens. Je me fais largué rapidement mais je m’accroche. Un groupe se forme très vite en se resserrant. Un creux se fait immédiat, mais, aidé par les vagues j’arrive à maintenir une distance raisonnable et qui ne se creuse plus trop jusqu’à la première bouée. Je suis assez fier de moi, ce n’est qu’après ce virage, que les « furieux » remettent la gomme à fond les manettes. Me voilà seul. Les vagues se calment. Je me mets en mode ‘marathon’. On contrôle la respi, le cardio et on pense à la technique.
Entretemps, Lulu et Estelle (qui étaient dans le même départ) ont fait vaillamment face. Sur la ligne de départ, à quelques secondes du ‘go’, un concurrent tombe au jus ! Le starter attend donc qu’il se remette en place. Pendant tout ce temps, Estelle et Lulu doivent attendre de longues minutes sur la ligne, à l’arrêt : vraiment pas un exercice facile sur un K1. Pour eux aussi cela va secouer. Tout le monde en prend plein la poire. Quelques instants plus tard je les croise. Lulu est passé sans trop d’encombres. A quelques dizaines de mètres, Estelle pagaie vaillamment. Super ! Elle a réussi à dompter le départ et la très grosse difficulté que représente cet exercice particulier. Chapeau Estelle !
Maintenant il me faut gérer l’effort, croiser les seniors qui filent et génèrent à nouveau une jolie flopée de vague, et rester concentrer pour garder l’équilibre. J’arrive au second virage, pas facile. L’endroit n’est pas large et je dois faire un joli coup de dénage pour ne pas risquer d’abîmer le bateau. La jeune fille qui surveille le passage correct des kayakistes, me jette un sourire de compassion et quelques encouragements, en me voyant galérer de la sorte. Sympa et merci à elle. Encore un bon kilomètre et le premier tour sera terminé. Le portage se déroule à hauteur du KCCM. La sortie est à peu près correct, le portage (sur l’épaule pour éviter d’abimer mon gouvernail comme à Hazewinkel, un âne ne tombe jamais deux fois dans le même trou) et je réembarque en douceur. L’accès n’est pas aisé mais les exercices faits à l’entrainement portent leurs fruits.
Je reprends le rythme. J’ai raté Lulu et Estelle. Je ne vois plus grand monde en face. En remontant jusqu’à la première bouée, je checke régulièrement les bords : personne sur la berge, cela signifie qu’Estelle tient toujours le coup ! Bonne nouvelle. Mon deuxième tour se déroule sans souci. Sur les derniers 500 mètres avant le portage, je me fais rattraper par deux dames, une toute jeune ... et une moins jeune. Je me mets sur la vague et j’arrive à tenir jusqu’à l’arrivée au ponton où je leur laisse la place pour ne pas les gêner. Fier de moi ! Le troisième tour s’annonce. Au moment où je plonge vers la bouée, deux seniors se tirent la bourre et me coupent la route, me poussent vers la berge, ouch, chaud devant. J’arrive à tourner sans dégâts et repars.
Les vagues se calment. Il me reste un peu moins de 4 kilomètres. La fatigue s’installe, et la concentration diminue, et tout seul comme un idiot, pratiquement sans vague, je tombe à l’eau. Je pense que j’ai rarement été aussi vite pour remonter sur mon K1. Si j’ai perdu 1 minutes ou 1 minutes trente c’est beaucoup. « Quel crét… » me dis-je. J’arrive à passer au travers des grosses difficultés et je me jette à la baille alors que cela se calme. Pas grave. Je me reconcentre sur la technique et la course. Il faut tout donner pour les derniers kilomètres. Un dernier virage, quelques centaines de mètres encore, le cardio explose. Les épaules, les dorsaux, tout rend la main, et pourtant, le bateau accélère encore un peu.
On oublie le mal, on pense aux jambes. Pousses, pousses, expires fort… Et puis c’est le coup de sifflet final.. libérateur. Rahhh Lovely. Content d’avoir fait ce BK. Un peu ‘cooling down’ pour éviter les courbatures le lendemain, le temps de retourner déposer le bateau à l’automobile et Estelle arrive en vue du final. Je chope l’appareil photo et réussi à lui capter le portrait en fin d’effort. Elle est exténuée. Elle a tenu tout le parcours, sans fléchir, sans voler à l’eau (elle !!!), et sur un bassin qui n’a rien de facile. Bravo Estelle. Une belle première. On discute avec Paul Rombaut. Lulu arrive peu de temps après. Il lui reste 2.500 mètres. Son rythme s’accélère, on sent qu’il jette lui aussi ses dernières forces dans chaque coup de pagaie. Son marathon prend fin sous les applaudissements de tous. Génial !!!
Le temps de se changer et déguster une délicieuse gaufre de Bruxelles et on se retrouve à la remise des médailles. J’en profite, ce sera sans doute une de mes rares médailles d’argent !!! Et voilà une médaille de plus pour le SKC, pas mal, non ? Pour être honnête, si je finissais la course, j’aurais eu de toute façon la médaille. Nous n’étions que deux dans la catégorie. Mais la satisfaction vient d’avoir fait, comme d’hab, le maximum et d’avoir tout donné sur cette course. Le premier dans ma catégorie est Didier Thibeaut du club H2O. Impossible à atteindre. Autre satisfaction, au marathon de Eindhoven, Didier m’avait mis près d’une demi heure dans la vue. Ici il me devance de 9 minutes. Et puis les autres concurrents ne sont pas venus, n’ont pas l’effort et n’ont même pas essayé de se dépasser. Alors, oui, je la mérite bien c’te médaille !
Autre surprise, c’est le bourgmestre de Mechelen qui fait la distribution des coupes et médailles. Chouette qu’un homme politique d’une grosse ville comme Mechelen prenne de son temps, un dimanche après-midi ensoleillé pour un sport comme le kayak. C’est assez rare et il faut le mentionner. Autre chose, vous saviez que la famille de Beethoven (oui oui le compositeur) avait des origines dans la cité de Mechelen?
Il ne rste plus qu'à ranger les bateaux et on repart tous les trois avec le sourire aux lèvres. Une belle journée se termine. D’autres aventures en kayak nous attendent…
Pour les photos, c’est ici :
https://flic.kr/s/aHskZ1kcuC